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La première heure dans ce jeu est déroutante, on est très vite "lâché" dans cette très sombre jungle urbaine, avec des tonnes de gadgets... dont un pas des moindres : le tank de Batman (qu'on appelera ici la "Batmobile"). On a l'impression que le level design et le gameplay ont été pensés à 75% pour ce véhicule. Et ne tournons pas autour du pot, cela rend le jeu... bourrin. Car si j'ai utilisé le mot "tank", c'est parce que c'en est véritablement un et les adversaires seront équipés en conséquence (ou est-ce l'inverse ?). Après, il y a bien quelques subtilités comme quelques énigmes du Riddler à déjouer grâce aux différents gadgets de la Batmobile, mais au volant de ce monstre, vous passerez la majorité du temps à foncer dans les rues de Gotham pour dégommer la véritable armée qui se dresse entre vous et le Arkham Knight du titre.

Un Arkham Knight qui, comme la plupart des antagonistes du justicier, révèle les névroses de ce dernier, bien que le mystère entourant son identité gâche la profondeur qu'aurait pû avoir ce personnage tragique. Mais de nombreux autres super-villains parsèment l'aventure, sans jamais qu'on ait l'impression d'un trop plein (si ce n'est que cette "nuit" semble durer une éternité), et l'un d'entre eux n'est autre que le Joker en personne. Rassurez-vous, il est bel et bien mort dans le précédent opus. Mais son fantôme hante l'homme chauve-souris et c'est amené narrativement et visuellement d'une très belle façon. Les questions morales qu'apporte ce personnage, qui implique directement le joueur (via notamment quelques très belles séquences hallucinées, dont une fameuse vers la fin du titre), réussissent à élever cette expérience vidéoludique au-delà du simple jeu d'action.

Car depuis le premier épisode dans l'asile d'Arkham, les développeurs ont comme référence directe la saga Metal Gear Solid (en particulier les deux premiers épisodes). Ici, les mécaniques de jeu s'écartent de l'infiltration et du côté "donjon" qui caractérisaient le premier opus de cette trilogie, mais se rapprochent du côté "techno-thriller" des jeux d'Hideo Kojima, expérimentent davantage dans la narration (cfr l'affrontement qui oppose Batman et le Mad Hatter) et peaufine ses personnages secondaires (le Arkham Knight fait immédiatement penser au personnage de Gray Fox). Bien sûr on reste loin de la qualité d'écriture de Kojima et son équipe, les relations entre les différents personnages et leurs motivations restent sans grandes surprises, mais le tout fait preuve de beaucoup de maturité et à ce niveau, on est dans la filiation directe avec la trilogie cinématographique de Christopher Nolan.

Malheureusement, cette narration est entâchée par un trop grand nombre d'objectifs secondaires sans grands intérêts (désamorçages de bombes, missions de sauvetage, courses sur circuit, ...). Si le gameplay et la prise en main font un quasi sans-fautes (le système de combat est un modèle de beat em up souvent copié depuis le premier épisode), on a tout de même la désagréable que le jeu s'éparpille dans l'excès (de touches, de gadgets, d'objectifs secondaires, de défis, ...) avec pourtant un terrain de jeu pas si énorme que ça et manquant d'intérieurs marquants, beaucoup de scènes se déroulant dans les rues de la ville.

Ce n'est peut-être donc pas le jeu le plus subtil qui soit, on peut notamment regretter une orientation plus musclée et manquant de clarté, mais cette trilogie aura creusé le mythe Batman d'une brillante manière et cette conclusion mérite qu'on s'y attarde quelques heures.

Reviewed on Feb 14, 2023


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